vendredi 23 avril 2010

GS II - Courriel n°13: Alias « Je »

Didier de Lannoy
Grand Satan

GS II - Grand Satan et la pancréatite (sottisier de courriels)
2006-2007

Extraits
Les destinataires des différents courriels ne sont pas indiqués



A propos de Nassogne au Togo, voir aussi: ---------------------------------------------------------------------------------------------------


Ecrirai-je le roman de « Je » ?

Et « Vi », qu’est-ce qu’elle en pense ?


« Je » aussi est un autre !

- Quel « Je », quel « autre » ? Tu nous embrouilles à la fin, douchka ! Sois plus clair !

« Je » comme Jean-Emile Caudron, quoi ! Le mari de Viviane, quoi !


Les Codroni, Jean-Emile et Viviane, ont donc cessé d’avoir disparu en mer (où Alain Brezault les a vainement cherchés, très longtemps, au téléphone et sur internet, au téléscope et au microscope, avec une pomme ou un melon d’angoisse dans la gorge) et sont enfin revenus de Corse.

- Oo fon a ! Bonne arrivée au royaume de Tintin !


Tu m’as donc recommandé, Jean-Emile (alias « Je »), de prendre un pull dans mes bagages… En cette saison, au Togo, le soir, il pouvait faire très froid, disais-tu… Dans le nord du pays, en période d’harmattan, les lions, les éléphants et les antilopes avaient l’habitude de se regrouper frileusement autour de quelques points d’eau… et ils y allumaient parfois de grands feux pour enrayer les épidémies de choléra…

- Aux dernières nouvelles, la situation se serait cependant stabilisée… on signale quand même une dizaine de morts… tués par des rafales de mitraillette ou de mitrailleuse lourde tirées, depuis un hélicoptère survolant la région à basse altitude, par des chasseurs de gros gibier… des safaristes de l’hôtel du Bénin sans doute, des « militaires en civil » peut-être…

te souvenais-tu…

- Sans effet, Jean-Emile ! Le Nord et l’Avé, ce sont des dossiers très différents ! Nassogne, ça se trouve dans le Sud, près de Lomé ! Et la « forêt » déboisée de la préfecture de l’Avé (dont les arbres « en liberté » ont été décimés par les fabricants de charbon de bois ou arrachés par les cultivateurs…et remplacés quelquefois par des arbres « domestiques » : des arbres servant à fabriquer des planches ou destinés à être utilisés sur des chantiers de construction… ou des arbres fruitiers, réputés plus serviles et plus rentables… ou des palmiers, évidemment, plantés pour leurs régimes de noix… et les divins liquides qu’on peut extraire de leur sève) n’a rien du tout à voir avec les savanes du Nord !

- Y a-t-il, dans la préfecture de l’Avé, des sorcières qui logent dans les arbres ? Et peut-on, Vieux Didier, grimper dans un arbre… libre ou domestique je m’en fous… y cueillir une sorcière… et lui grignoter le bec et les oreilles ?

- On y élève des animaux de basse-cour (des poules, des pintades, des dindons, des lapins, des canards, etc) et du petit bétail (des cochons, des chèvres et des moutons, etc)…

- Peut-on, dans l’Avé, Vieux Didier, ramasser un moustiquier tombé de son arbre ? Non ?

- On y exploite de petites palmeraies d’élaeis et de mini-plantations de tecks et d’eucalyptus, je viens de te le dire, non ?

- Non ? Pourquoi non ? Parce que ça pique ou parce que chaque moustiquier a toujours un propriétaire ?

- On y cultive non seulement du maïs, du piment, du gingembre, des arachides, des ananas, du manioc, des ignames, des patates douces, des haricots et des bananes plantain mais aussi toutes sortes de légumes : des tomates, des oignons, de l’ail, des choux et des aubergines, des gombos…

- Et du mil, monsieur l’instituteur ?


Et cesse donc, nom di Djû, de me réciter par cœur de très larges extraits de ton manuel de géographie ou de sciences naturelles ? Me prendrais-tu pour un Yovo humanitaire venus faire du tourisme rural à Nassogne et dans les villages des environs ? On te paie au nombre de mots ?


- Naan on ne trouve pas de mil en-dessous d’Atakpamé…

- Donc on ne boit pas de tckoukoutou dans l’Avé ?

- Bien sûr que si ! On y boit du tchoukoutou…à Assanhoun, à Kévé et même à Badja, le jour du marché… mais préparé par des Kotokoli, des gens de Sokodé, avec du mil cultivé au Nord…

- Et on s’imbibe de vin de palme ?

- Evidemment !

- Et on biberonne au sodabi ?

- Pas de problème !

- Et du cannabis, ça se plante et ça se clope dans le quartier ?

- Décidement, Jean-Emile, tu ne penses qu’à boire, à fumer, à te faire composter par un moustique ou à courir les sorcières et à leur mugueter la tronche… Mais puisque les légumes de l’Avé ne t’intéressent pas vraiment, voilà la viande de chasse que tu pourrais manger par ici : de l’agouti, du lièvre ou du lapin sauvage, des pintades des bois et des perdrix qui se cachent dans les champs de maïs…

- Grave ! On se croirait dans les Ardennes flamandes ou au Brabant wallon… Il n’y a pas de plus gros gibier dans les environs, Vieux Didier ?

- Pas beaucoup… Quelques biches, des singes (mais les gens du Sud n’aiment pas trop manger ça)… et parfois, dit-on, des buffles…

- Des « biches » ?

- Des gazelles ou des antilopes, si tu préfères…

- Pas même un safariste de l’hôtel du Bénin… qu’on pourrait chasser à la mitrailleuse depuis un hélicoptère survolant la région à basse altitude?

- Naan ! Mais on peut quand même attraper des varans d’un mètre de long… qu’on assomme à coups de gourdin !

- Désespérant ! Tu fais chier, monsieur le professeur ! Change de matière ou passe le concours de l’agrégation, bon sang ! Apprends à stimuler ton auditoire ! Sache ce qui fait swinguer et saliver tes « apprenants » ! Sois appétissant… Sinon plus personne ne voudra suivre les « enseignements doctoraux » que tu nous infliges ! Demande donc à Jipéji comment il procède ! Ça fait plus de cinq ans qu’il joue le même rengaine de littérature africaine sur les tréteaux de CEC… avec toujours autant de tifosi ! Il doit avoir un gri-gri, non ? Tu ferais bien de lui demander l’adresse de son féticheur…

- Voyons, Jean-Emile, le varan fumé, fumé et encore fumé (jusqu’à ce qu’il soit complètement desséché et ressemble à du makayabo) et préparé avec un sauce deku, tu n’aimes pas ça ?


J’ai quand même suivi ton conseil, Jean-Emile… mais je constate, à l’arrivée, que mon pull, de très bonne laine, a

- Des accrocs ?

- Naan, Jean-Emile, des trous !

- Où ça ?

- Dans le dos ?

- Provoqués par quoi, Vieux Didier ? Un clou rouillé, des termites, une morsure du cheval de Satan, des épineux, des fourmis « magna » qui aiment se glisser dans les petites culottes des jeunes filles et sous les pulls des vieux croûtons, les crocs d’un serpent clandestin ?

- Meeeunan, provoqués par de simples cigarettes, Jean-Emile ! Ce sont des trous de fumeur… comme ceux de l’ancien rideau du salon (Ana vient d’en acheter un nouveau), au n°21 de la rue Maes !

- Tu fumes par derrière maintenant, Vieux Didier ? Tu fumes à l’envers ?

- On m’a fumé dans le dos ! C’est sûrement Mohamed ou Jamal ! Ou Rachou ou Arantxa ou Marychelo Lopez ou Tula Aslanidis ! Ou Claudine De Moor et Jean-Marc Dezille ! Ou Filip De Boeck ou Alain Brézault ou Jipéji ou Didier Beaufort ou Dahlia Luxembourg ou Roby Comblain ou Claudine Gillet ! Tu les connais ?

- Et Marianne Berenhaut ?

- Jamais ! Marianne ne ferait jamais des choses pareilles ! Tu la connais ?

- Et Françoise De Moor ?

- Ni la maman d’Arno, ni Kangni Alem… qui exècrent le tabagisme ! Ni Hans Samyn, ni Abdou, ni Françoise Lambinet ! Tu les connais ?

- Et Joëlle Baumerder et Marie-José Engulu ?

- Elles ont trahi la cause ! Elles ont décidé de passer à l’ennemi et d’arrêter de fumer ! Bientôt, elles deviendront allergiques au tabac… et nous feront la leçon à tous… Avec passion ! Comme des converties… Et, d’ailleurs, elles m’ont dit que tu puais le vieux tabac ou le mégot mouillé… et qu’elles ne te connaissaient même pas et qu’elles n’avaient jamais entendu parler de toi…

- Bonjour quand même ! Dag Allemaal !

deux petits trous et je me demande ce que je dois faire, avec quelles rustines et avec l’aide de qui (un Zémidjan peut-être… un débrouillard, habitué à réparer lui-même les chambres à air de sa moto ?) je pourrais boucher ça… si je ne veux pas ne pas me choper des courants d’air… ce qui, compte tenu de mon état de santé précaire (voir, à ce sujet, les différents PV d’interrogatoire de l’enquête médico-policière rondement menée par mon ami Paulo Carter… qui, je l’espère ne me lit pas… sinon…

- Hypocon !

il va encore s’énerver et prétendre que je m’invente des maladies « pour faire l’intéressant »), pourraient nuire gravement à ma santé.


Il y a encore un autre grand problème à rapetisser, Jean-Emile : le soir, vers 18 ou 19 heures, quand le soleil se couche et que je bois mon verre (toute une bouteille d’un litre et demi d’eau bien fraîche, l’horreur !) sur la terrasse, le thermomètre indique encore une température avoisinant les 28 degrés !

- Et la nuit ?

- La nuit, ça va mieux, je dors en slip, je mets le ventilo à fond (force 5) et, vers trois ou quatre heures du matin, le pull commence, tout doucement, à devenir supportable !

- Attends les premières semaines de janvier, Vieux Didier, tu verras…Quand il ne fera plus que 18 ou 19 degrés au lever du soleil (voire même 15, dans le Nord)…

- Bof, du moment que ça remonte à 25 ou 30 degrés pendant la journée…


Quant à toi, Viviane, je me permets de te poser la question suivante et

- Pourquoi un serpent ne porte-t-il pas de casque à pointe, ni de cornes, ni d’éperon ? Pourquoi les serpents ne sont-ils pas des cactus ?

- Il y a des serpents dans l’Avé, Vieux Didier ? Des vipères, des mambas verts… ou quels autres affreux reptiles ?

- Meeeunan, Viviane ! De toute façon, il ne faut pas croire que tous les serpents soient mauvais ! Certains sont très bons (à manger), surtout grillés ou servis avec une sauce au piment… car si le serpent est un animal à sang froid, il se consomme chaud ! Tu ne dois donc pas en faire un blocage ! Certains serpents, tels que le Python, sont même considérés comme des êtres « protecteurs » (on dit que, dans des temps lointains, les pythons ont sauvé la vie des habitants de plusieurs villages… et qu’ils ont réussi à mettre en déroute toute une armée ennemie), que l’on respecte et que l’on vénère… et auxquels personne ne se permettrait de faire du mal…

sans attendre, j’y réponds, moi-même (à Kinshasa, mon patron, le professeur Mbulamoko Nzenge Movoambe, alors Secrétaire général du CIDEP, m’appelait « pressé-pressé »… parce que je n’aimais pas discuter, négocier, mégoter… et que j’étais impatient… et que je voulais toujours que les choses se fassent tout de suite… comme Antigone et les éjaculateurs précoces), dérékitima :

- Pour qu’un autre serpent, puisse l’avaler plus facilement, tiens, Viviane ! Sans se blesser !


J’entends déjà vos commentaires apitoyés :

- Je : Sans sa femme, Vieux Didier déconne complètement…Il pourrait même se prendre au sérieux, ce qui est le stade ultime de la maladie !

- Vi : On ne pourrait pas donner un sens à sa vie, l’occuper, lui trouver du travail à Nassogne ? N’importe quoi ! Du jardinage ou du repassage…Ou bien du raccommodage de vieilles chaussettes ou de vieux pulls troués ? Il ne pourrait pas s’occuper du nourrissage des porcs ou des canards de Gougoui, fabriquer du charbon de bois et planter du manioc ou des ignames avec Kossi ? Dans les villages, même les vieux participent (ils savent aussi faire la pause, se ménager… et, assis à l’ombre d’un arbre, régler des problèmes de terres et de famille, arbitrer des conflits, grommeler et philosopher… et boire du deha, du tchoukoutou ou du sodabi, non ?) aux travaux des champs, non ?

- Je : Oui, mais qu’il commence d’abord par se brosser les dents chaque matin (au Togo, si mes souvenirs sont bons, on ne peut pas parler aux gens tant qu’on ne s’est pas lavé la bouche), avant de dire « Ofoin ! » aux gens ! Sans sa femme, Vieux Didier n’a plus de manières et devient carrément impoli…

- Vi : Ça c’est tout à fait vrai ! Qu’il se rince d’abord la bouche… et qu’il recrache toute la bave de la nuit avant de se permettre de nous adresser la parole !

- Je : Et qu’il prenne ensuite une bonne douche parce que son caleçon jaunâtre-orangé-rouille schlingue l’antimite, l’insecticide (s’en sert-il pour tuer les morpions qu’une chèvre ou une cane à la cuisse légère et aux talons hauts lui aurait refilés ?), la chouette décapitée et le lézard séché ! Sans sa femme, Vieux Didier se laisse carrément aller…

- Vi : Et c’est à ce vieux-là, complètement perturbé, que tu veux raconter ta vie ? Tu ne vas quand même pas lui demander d’écrire un bouquin sur toi ? Il faudrait tout d’abord, au minimum, que sa femme le reprenne en mains, refasse son éducation, lui apprenne à châtier son langage et à ne pas mettre son coude dans l’assiette de son voisin et à ne pas couper sa salade avec un couteau ! Et puis, d’ailleurs, c’est quoi cette histoire de bouquin que Vieux Didier devrait écrire « sur toi »… auriez-vous des accointances que j’ignore… Et aurais-tu une vie « à toi » qui existerait en dehors de moi ? Explique !


Moralité ? Aucune !